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Livraison urbaine : la France championne de courses en relais

Publié le 7 septembre 2017

2. Des commerçants de plus en plus sollicités

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Nerf de la guerre pour les gestionnaires des réseaux de relais, les commerçants aptes à se transformer en point de retrait peuvent être difficiles à trouver dans les aires urbaines où les flux de livraison de colis sont les plus importants.

Pour un commerçant, le fait de devenir un point de retrait de colis permet de générer du trafic supplémentaire, d’augmenter la part de futurs clients potentiels. « Un commerçant va développer en moyenne son chiffre d’affaires de 15 %. Ce pourcentage peut être plus ou moins important selon la typologie de boutique et des produits vendus », précise Sylvain Thiel, directeur commercial de Mondial Relay. Les relais bénéficient ainsi, grâce à ce trafic généré, de rentrées économiques non négligeables. En revanche, le partenariat noué avec les gestionnaires de relais n’est pas économiquement intéressant à lui seul. Les commerçants n’ont pas intérêt à devenir relais pour les seules commissions que cette activité pourrait leur apporter. « Généralement, celui qui fait ça pour la rémunération n’y trouve pas son compte, témoigne Jean-Sébastien Leridon de Relais Colis. Nous sommes sur des moyennes de 300 euros par mois donc ça ne tient pas. En outre, le commerçant dans cette logique ne va pas être forcément agréable, va vouloir prendre plus de colis pour gagner davantage d’argent… Ce qui est vertueux c’est celui qui fait cela pour le trafic. Plus il est aimable, mieux il va gagner sa vie avec ses vrais produits et non sur les quelques euros que nous lui versons à côté. »

 

Les sommes attribuées aux commerçants pour cette activité sont fixées au préalable par contrat, et peuvent varier en fonction de la taille des commandes traitées et de la complexité de leur réception, stockage et remise aux clients. Un magasin réceptionnant un sommier sera de manière générale mieux rémunéré pour cette tâche que son voisin ayant reçu une paire de chaussettes. Et pour les recevoir, plusieurs mètres carrés (cela peut se compter en dizaines) doivent être alloués au stockage des commandes, ce qui dans le cas de petites boutiques peut parfois représenter le quart de la surface totale voire plus dans certains cas.

 

Une rotation structurelle

À Paris comme dans d’autres grandes métropoles, les loyers élevés peuvent freiner le désir des commerçants d’intégrer un réseau de relais. Ils ont également un fort impact sur la rotation des adhérents, de plus en plus rapide en particulier dans l’ouest parisien, la zone la plus sensible en matière de recherche de commerçants pour les acteurs du relais. « Nous avons deux marchés aujourd’hui, entame Jean-Sébastien Leridon. Celui des zones rurales est complètement captif. Nous recevons chaque jour des candidatures de commerces qui veulent devenir relais parce qu’ils en ont besoin pour pérenniser leurs activités. Le turnover y est presque inexistant : le relais nous quitte quand il ferme, qu’il part en retraite ou lorsque nous décidons de nous en séparer. À l’inverse il existe des zones de très forte densité, comme dans l’ouest parisien, où la concurrence est rude pour trouver le maximum de relais. Le relais type aujourd’hui dans les grandes villes c’est un caviste, un opticien, un jeune commerçant qui veut se faire connaître et qui va nous utiliser deux ou trois ans le temps d’y parvenir. Une fois qu’il est en place, il va récupérer son foncier, qui est cher, pour le dédier de nouveau à son activité principale. Le turnover dans ces zones est structurel. Il est de l’ordre de 30 à 40 %, contre 10 % lorsque j’ai commencé dans le métier (en 2009). » La sélection de commerçants susceptibles de rester assez longtemps dans un réseau est ainsi devenue un enjeu crucial pour les sociétés de livraison en relais.

 

Les candidatures de commerçants en métropole deviennent précieuses, comme en témoigne Laurent Soleilhac, qui confirme également la séparation du marché des relais en deux zones (campagne et métropole) : « Nous travaillons sur l’indicateur qui consiste à dire que 95 % de la population est proche d’un relais. Il y a des zones blanches, à l’instar de celles des opérateurs téléphoniques, qui sont un peu difficiles à travailler parce que peu rentables. Et il y a les zones les plus urbaines qui concentrent toute la difficulté d’un réseau de qualité puisque la demande y est la plus forte et le nombre de relais parfois restreint. Dans les grandes villes, les commerçants ont parfois déjà suffisamment de trafic et refusent de devenir un relais. Nous sommes dans un contexte et une situation un peu compliqués : c’est là où il y a le plus de demande et en même temps le plus de réticence. » Le directeur marketing du réseau de relais de La Poste se veut cependant rassurant quant à l’avenir du développement de son réseau dans les grandes villes. « Il n’y a pas péril en la demeure puisqu’il y a suffisamment de commerçants pour continuer à progresser, affirme-t-il. La source n’est pas tarie. »

 

Bien mailler sans aller dans l’excès

À l’instar des autres représentants des réseaux de relais, Laurent Soleilhac assure qu’il ne sert à rien pour autant de recruter à tout-va juste pour gonfler les chiffres. « Nous essayons de faire en sorte d’avoir un taux de groupage suffisant et de vérifier que chaque Français bénéficie d’un relais proche de chez lui », développe-t-il. Cette donnée sert également au service de La Poste d’argument pour faciliter les négociations commerciales des autres filiales du groupe : « Quand les transporteurs comme Chronopost, Colissimo ou DPD France vont vendre notre réseau à des sites marchands, ils ont besoin de montrer que nous couvrons quasiment toute la France et tous les Français. » Toute la difficulté réside alors à continuer d’ouvrir de nouveaux points tout en s’assurant qu’ils soient réellement efficaces. Si un relais fonctionne bien, il ne serait en effet pas rentable d’en ouvrir un autre dix mètres à côté, sauf si le premier commence à saturer. Il est en revanche intéressant de suffisamment mailler un périmètre pour bénéficier de solutions de secours, de relais qui puissent faire office de zone de stockage tampon pour réceptionner des colis en cas de problème chez un point voisin et empêcher ainsi une dégradation de l’expérience de livraison. « Comme tous les réseaux de livraison, l’implantation de nos Points Relais est cohérente par rapport à la densité de la population, relate Sylvain Thiel de Mondial Relay. Cependant, certains commerçants en zone ultra urbaine n’ont pas de stockage infini, surtout en période de forte activité (soldes, fin d’année…). Cette donnée nous pousse continuellement à développer le maillage pour éviter la saturation. Lorsqu’un relais sature, il disparait du radar du consommateur et du chargeur et entraîne pour nous une perte de vente. Un relais saturé qui n’est plus présent sur les sites Internet peut représenter des centaines de colis en moins. »

 

Pour éviter de perdre de l’argent et de voir leur nombre de clients diminuer, les sociétés de livraison en relais s’appuient sur des systèmes d’information permettant une vision globale de leurs flux, avec des possibilités de réattribuer des commandes plus ou moins rapidement. Elles prennent également soin de sélectionner leurs commerçants sur des critères précis et procèdent régulièrement à des contrôles sur site pour s’assurer du bon fonctionnement de leur réseau.

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