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et logistique

Interview

François Rispe, directeur général de Prologis Europe du Sud

François Rispe, directeur général de Prologis Europe du Sud, revient sur la croissance opérée par le spécialiste international en immobilier logistique en 2015, et sur ses perspectives de développement pour l'année 2016.

Publié le 18 avril 2016 - 16h24
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Comment s’est passée l’année 2015 pour Prologis France ?

Positivement, car même si la France est le ventre mou de l’Europe, nous y avons fait croître notre portefeuille de 375 000 m², dont environ 240 000 m² sous forme de développement et le reste par acquisition.

 

Comment l’expliquez-vous ?

Il y a eu un phénomène de rattrapage par rapport à 2014 avec des projets de consolidation dans différents secteurs comme la grande distribution. Prologis a su tirer son épingle du jeu car nous étions bien positionnés à Paris, Lyon et au Havre notamment.

 

Vous avez même osé « refaire » du développement en blanc au Havre et bientôt à Lyon…

Avant la crise de 2008, il y avait beaucoup d’offres en blanc car le besoin était important et, du coup, elles étaient automatiquement absorbées. Depuis cinq/six ans la demande avait vraiment ralenti à cause de la politique économique peu favorable au monde de l’entreprise. Dans ce contexte la rentabilité, qui doit être relativement élevée pour un bâtiment en blanc, n’était plus au rendez-vous. En 2015, nous avons décidé de reprendre le développement en blanc mais avec parcimonie, sur des territoires où il y a de la croissance et des fondamentaux sains. C’est le cas du Havre : le port a été réformé, sa productivité est bonne et il prend des parts de marchés aux ports du Nord. En parallèle il n’y a pas forcement énormément de terrains disponibles. Or, Prologis y est bien présent avec 185 000 m². Tous les paramètres sont donc réunis. Avec 35 000 m² proposés en blanc nous pourrons accompagner nos clients actuels mais aussi en conquérir de nouveaux. Aujourd’hui, trois mois avant la livraison du bâtiment, trois cellules sont déjà louées sur les six existantes. À Lyon, second marché logistique en France après Paris, nous avons acheté un terrain il y a un an, où nous venons de lancer 30 000 m² en blanc. Sur ce marché où nous possédons 550 000 m² loués à 100 %, nous pourrons ainsi répondre aux attentes de nos clients qui ont besoin de croître. Notre rôle est d’anticiper les tendances du marché et nous avons la chance de pouvoir le faire car à Lyon nous avons des terrains, ce qui est rare.

 

Ferez-vous d’autres développements en blanc en 2016 ?

Ce n’est pas impossible mais pas partout. Au Havre, en fonction de la vitesse de commercialisation actuelle, nous pourrions relancer une autre tranche et pourquoi pas dans le nord ou le sud de Paris. Nous en saurons plus d’ici fin 2016.

 

Quelles sont les tendances du marché ?

Tout d’abord, les gros opérateurs, en particulier la grande distribution, sont dans une logique d’optimisation et de réduction des coûts. Ils ont besoin de regrouper des formats différents d’entrepôts entre eux comme la logistique de l’hyper avec celle du super, celle du frais avec celle du sec… Cela génère de nouveaux projets. Bien sûr cette tendance n’est pas nouvelle mais elle continue, et continuera car chaque enseigne de la grande distribution le fait a son propre rythme. En revanche, sur le segment du 5/10 000 m² à 20 000 m² la demande est un peu moins dynamique mais nous sommes prêts à accompagner les petites et moyennes entreprises.

 

Pour autant, les PME ne sont pas majoritaires dans le portefeuille de Prologis et ne doivent pas s’adresser à vous spontanément…

Nous avons principalement des grands groupes mais nous ne perdons pas de clients plus petits car notre stratégie consiste à placer nos entrepôts là où il y a un véritable besoin. Et, s’ils sont bien placés, les clients, gros ou petits, viennent. Nous avons des PME dans notre portefeuille et nous sommes organisés, grâce à la richesse de notre patrimoine, pour capter toutes les demandes quelle que soit leur taille. Même si l’augmentation des demandes pour les entrepôts de grande taille est plus importante qu’il y a cinq ou six ans, nous avons observé dans les autres pays européens et les USA que les PME bougent quelques années après les grandes entreprises. Nous pouvons imaginer ce scénario en France pour 2017. C’est la tendance que nous anticipons.

 

Cette capacité de réflexion et d’anticipation que vous mettez en avant vous permet-elle de proposer un service supplémentaire au-delà du mètre carré ?

En effet, nous proposons à nos clients un réseau qui couvre particulièrement bien la France logistique. Trois quarts d’entre eux sont multi-locataires chez nous : ils louent un entrepôt à Marseille, au Havre… De plus, nous positionnons nos terrains par rapport à la demande future. Nous sommes par exemple les premiers à avoir acheté au constructeur Peugeot un grand terrain en friche dans le sud de Paris. Pourquoi cette prise de risque ? Car nous avons la capacité de voir l’évolution d’un marché et d’un secteur avant les autres et cela même sur des sites à priori peu évidents. Cet avantage nous permet de capter les demandes tout en offrant par exemple un avantage fiscal à nos clients en IDF. La capacité d’anticipation de notre groupe est possible car nous avons le plus important portefeuille clients et que nous observons l’évolution de notre métier dans d’autres pays.

 

Votre métier peut-il encore évoluer ?

Oui, il va évoluer. Tout d’abord la taille des bâtiments a encore tendance à augmenter. Il y a quelques années des entrepôts de 40-50 000 m² étaient extrêmement rares. La seconde évolution c’est l’e-commerce qui l’a créée et elle va s’accentuer avec la construction de mezzanines, des places de bureaux plus importantes, des configurations d’accès de site plus sécurisées… Or, en France, beaucoup d’acteurs ne se sont pas encore déployés dans l’e-commerce car nous sommes davantage dans une logique d’attente que d’investissement. Mais cela va bien finir par changer. Enfin, à terme, la pénurie de terrains va sûrement provoquer une révolution de notre métier mais ce ne sera pas avant 10 à 15 ans.

 

C’est-à-dire ?

Dans nos entrepôts, nous devrons aller de façon logique vers un développment vertical et non plus à l’horizontal. En effet, la ressource foncière n’est pas illimitée, la contrainte écologique de plus en plus forte et surtout, le développement de façon horizontale coûte cher, particulièrement dans les périphéries des grandes villes. Mais il faudra d’abord faire preuve de pédagogie pour inverser l’aversion des pouvoirs publics pour notre métier pourtant créateur d’emplois et essentiel au bon fonctionnement de notre économie. La seule grande inconnue est donc : quand cela aura-t-il lieu ?

 

Finalement Prologis sera-t-elle toujours la même entreprise dans quelques années ?

La tendance de fond est de disposer d’une forte capacité de financement afin d’accompagner notre croissance. Mais nous devenons de plus en plus une société de services qui dépasse le cadre pur et simple d’un contrat de location de surface. Nous allons, par exemple, mettre en place un portail clients afin de dématérialiser toutes nos relations commerciales. Nous devrons continuer d’innover, comme nous le faisons déjà, dans la ressource humaine afin de garder et d’attirer les talents. Prologis investit aussi dans la business intelligence afin de toujours mieux appréhender et anticiper les besoins de ses clients. Nous pensons que demain notre métier sera encore plus intelligent. Le challenge ne sera alors pas de garder l’information mais de la partager efficacement. La seule permanence que je vois, c’est la culture d’entreprise forte qui est celle de Prologis et qui constitue notre atout principal. Pourquoi ? Tout simplement parce que personne ne peut la copier.

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