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Face à face : Laurence Giard, directrice générale de Segro France

Logistique urbaine, zones à faibles émissions mobilité, environnement, évolution du marché de l’immobilier logistique… Voxlog revient avec Laurence Giard sur les grands enjeux qui animent Segro aujourd’hui et demain.

Publié le 19 mars 2024 - 15h00
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 Alexandre Moulard

Segro réhabilite actuellement, dans le cadre de l’appel à projets « Réinventer Paris 2 » – lancé par la Ville de Paris, l’ancienne gare des Gobelins au cœur du quartier des Olympiades, dans le 13e arrondissement de Paris. Comment se passe ce projet d’envergure pour la foncière ?
Segro est un acteur majeur de l’immobilier logistique et industriel en Europe, implanté en France depuis plus de 50 ans. 50 % de notre portefeuille est constitué d’actifs urbains, c’est-à-dire des centres de distribution urbaine et des parcs d’activités. Dans ce contexte, nous avons souvent été amenés à réfléchir à la requalification de friches industrielles, ou de lieux sous-utilisés ou abandonnés. La question de la réhabilitation de cette gare en plein Paris entre donc véritablement en résonnance avec l’ADN de Segro. Ce projet encapsule toute notre philosophie, autour de sujets tels que la requalification, l’adaptation, la transmission et le développement durable par exemple. Nous portons une attention tout particulièrement à la végétalisation, la biodiversité et au retour de la nature en ville au travers de ce projet. L’innovation se place également à l’intérieur et à l’extérieur de cet espace avec des outils utilisant l’IA. Niveau calendrier, la première phase de travaux de curage et de désamiantage a été lancée en 2023 et s’est terminée en février 2024. Dès le mois de mars, nous avons démarré la réhabilitation à proprement parler pour une livraison prévue au premier semestre 2025. Sur un plan plus commercial, nous constatons de nombreuses marques d’intérêt. Toutes les tendances de fond dont nous parlons depuis plusieurs années – livraison à domicile, commandes en ligne, digitalisation, pénétration d’Internet au sein des territoires, omnicanalité… – ont participé à rendre la logistique du dernier kilomètre absolument nécessaire. Le site des Gobelins s’adressera donc à de multiples secteurs, du BtoC au BtoB : biens de consommation, distribution alimentaire, stock déporté des magasins parisiens mais aussi répartiteurs pharmaceutiques, cosmétiques, maintenance et services de la ville, musée et fondations…

 

Dans ce contexte, comment abordez-vous le sujet des zones à faibles émissions mobilité (ZFE-m) dans le développement de vos projets ?

Le secteur de la logistique a un vrai rôle à jouer dans l’amélioration de la qualité de l’air globale pour aller vers des villes plus apaisées. Notre rôle en tant qu’investisseur est de mettre en place les infrastructures nécessaires afin que nos clients puissent continuer à déployer des flottes de véhicules plus durables. Un certain nombre de nos implantations, en bordure de la ZFE, peuvent faire office de centres de consolidation avant d’entrer dans l’espace urbain avec des véhicules propres. Je pense notamment à nos sites de Gennevilliers, de Garonor, de Bonneuil-sur- Marne et Sucy-en-Brie ou bien encore d’Aulnay-sous-Bois. Parallèlement, sur l’ensemble de nos sites péri-urbains, nous travaillons avec nos clients à l’installation de bornes de recharge électrique permettant de renouveler leur flotte de véhicules de livraison urbaine. Les sites des Gobelins ou de la Chapelle dans Paris intra-muros, qui doivent permettre une livraison à 100 % en véhicules électriques, seront tous deux équipés de bornes de recharge et soutiennent également le développement de la cyclologistique.

 

De nombreux sujets impactent le secteur de l’immobilier logistique. Raréfaction du foncier, enjeux environnementaux, zéro artificialisation nette (ZAN)… Comment les abordez-vous chez Segro ?
Les enjeux environnementaux impactent en profondeur notre façon de travailler depuis un certain nombre d’années. Ils sont pris en compte et totalement intégrés dans nos process. Nous n’imaginons plus construire un bâtiment sans effectuer au préalable une analyse complète du cycle de vie pour en mesurer l’impact carbone et le réduire. Nous n’imaginons plus non plus de démolir sans recycler 100 % des matériaux qui peuvent l’être, sur site. La certification Breeam « Excellent » est devenue un standard de construction pour nous, et nous ne développons plus aucun bâtiment au-dessous de ce niveau. Cela est devenu un minima. Nous commençons par ailleurs à travailler avec certains de nos clients à l’obtention de la certification Breeam « In-Use » qui reflète la performance environnementale dans le cadre de l’exploitation des bâtiments. Cela s’illustre comme un partenariat entre le client et le bailleur, qui prend en compte le management du bâtiment, les sujets de santé et bien-être et la gestion des ressources. Tout cela a été structurant dans le développement de Segro. Sur le sujet Zéro artificialisation nette (ZAN), Segro, en tant qu’opérateur très urbain, dispose d’une majorité de sites sur des terres qui ont déjà été artificialisées. 15 de nos plus beaux fleurons, soit près de 40 % de nos mètres carrés, sont d’anciennes friches que nous avons réhabilitées, et parmi eux l’ancien site PSA à Aulnay-sous-Bois et l’ancien site d’Alstom à La Courneuve. Enfin, concernant la raréfaction du foncier, nous avons été parmi les premiers à développer des bâtiments à étages, en témoigne le projet Paris Air2 à Gennevilliers, livré en 2018. Nous avons par ailleurs livré l’an dernier un parc d’activités à étages à Élancourt, et nous travaillons aujourd’hui sur la réhabilitation de la gare des Gobelins qui est un espace sur deux niveaux.

 

En 2022, Segro France lançait sa charte Impacts. Où en êtes-vous aujourd’hui ?
Nous sommes très heureux de l’évolution de cette charte. Elle illustre une façon de travailler qui emmène toutes nos équipes : asset management, property management, développement, finance... Toutes travaillent au développement de cette charte lancée en septembre 2022 sur notre Parc des Petits Carreaux à Bonneuil-sur-Marne, un parc d’activités de 150 000 m² qui accueille 160 entreprises et 3 000 employés. L’idée était de pouvoir jouer un rôle et d’avoir un impact positif pour les villes et leurs habitants, en se positionnant comme une passerelle entre acteurs publics, associatifs et nos clients locataires sur le parc. Nous avons donc rassemblé ceux qui le souhaitaient sous une charte qui coordonne et organise des actions concrètes en faveur de l’emploi, de la formation et de l’insertion professionnelle. Ainsi, quand un client signe un bail sur ce site, nos property managers évaluent avec lui les modalités de participation à un forum de l’emploi ou à l’animation de stages par exemple. Nos clients ont accueilli très positivement cette démarche, et nous l’avons donc étendue sur les territoires situés au nord et à l’est de l’Île-de-France en 2023 ; nous souhaitons à terme la déployer sur l’ensemble de nos implantations en Île-de-France et en régions. En 2023, l’immobilier logistique enregistrait une diminution de 9 % de la demande placée en France par rapport à 2022, descendue à 3,2 millions de m² (source : étude Arthur Loyd Logistique).

 

Comment avez-vous vécu cette année 2023 ?

Segro a réalisé une solide performance opérationnelle en 2023 en dépit d’un contexte macro-économique moins favorable. Sur la logistique, notre portefeuille affiche moins de 1 % de vacance. En définitive, nous avons été assez peu affectés par la chute du volume des prises à bail. Sur l’année 2023, nos loyers contractualisés ont augmenté de plus de 10 % à la fois avec du développement et de l’asset management sur notre portefeuille existant. En ce qui concerne le développement, nous avons livré en 2023 plus de 120 000 m², dont 95 500 m² sont déjà loués. Nous prévoyons d’achever la commercialisation d’ici la fin 2024.

 

Dans ce cadre, quel est votre ressenti sur l’évolution du marché en 2024 ?

Il est vrai que les incertitudes macroéconomiques et géopolitiques restent élevées, mais nous constatons néanmoins une chute de l’inflation au cours des derniers mois. La tarification des marchés financiers laisse aussi entendre que les taux d’intérêts ont atteint leur maximum donc, si cette tendance se maintient, elle constitue une toile de fond positive pour un redressement du sentiment du marché de l’investissement pendant l’année. Nous détenons un pipeline de plus de 400 000 m² à développer, ce qui nous permet d’envisager une augmentation de plus de 50 % de nos loyers contractualisés dans les prochaines années. Cette réserve foncière localisée sur des marchés core, très demandés et essentiellement urbains, offre des opportunités supplémentaires pour notre croissance, compte tenu de l’offre limitée.

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