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et logistique

Transport

Le Grand Paris de la logistique urbaine

Publié le 28 juin 2018

4. Transport fluvial : retour sur le devant de la Seine ?

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Alors que les axes routiers franciliens se densifient ou voient leurs accès restreints, le transport de marchandises le long des fleuves et canaux fait progressivement son chemin au sein de projets et d’expérimentations du dernier kilomètre.

Développer le transport fluvial et en faire un véritable atout dans la logistique du dernier kilomètre du Grand Paris : voilà une des actions que souhaite mener la Métropole du Grand Paris dans le cadre de son Pacte pour une logistique métropolitaine. L’objectif : répondre aux risques futurs de congestion des axes de circulation et réduire les émissions de gaz à effet de serre. Chaque année, ce sont 16 millions de tonnes de marchandises qui sont transportées par le trafic fluvial en Île-de-France, soit 8 % des tonnages transportés dans la région, principalement dans le domaine du BTP et des déchets. Et alors que la logistique se penche sur des moyens alternatifs pour accéder en plein coeur de la capitale, les avantages de ces voies navigables commencent à intéresser les chargeurs et logisticiens.

 

Le mouvement a déjà été engagé avec l’exemple remarqué de Franprix, qui, depuis le port de Bonneuil-sur-Marne (94) jusqu’à celui de la Bourdonnais dans le VIIe arrondissement de Paris, approvisionne 300 de ses magasins en apportant par bateau 70 % de leurs marchandises depuis 2012. En 2017, le trafic de Franprix a atteint un total de 33 589 EVP, soit une augmentation de 14 % par rapport à l’année précédente selon Haropa – Port de Paris. Mais les exemples de ce type sont également accompagnés d’échecs. Lancé la même année, un projet de navette fluviale sous la houlette de Vert Chez Vous proposait du transport de marchandises le long de la Seine en intramuros. Le projet fût finalement stoppé en 2014, faute d’avoir su trouver l’équilibre financier. En effet, le transport fluvial de marchandises se heurte à la difficile comparaison face à la route, plus avantageuse en termes de coûts et de temps de transport et moins soumise aux problématiques de rupture de charge. « Pour la logistique urbaine, le fluvial est tout de suite plus compliqué. Il y a en général des questions de délais au niveau des écluses, mais aussi un surcoût pour le chargeur », estime Michèle- Angélique Nicol de l’Atelier parisien d’urbanisme. « C’est pourtant un axe très intéressant car la Seine traverse toute la métropole. »

 

L’optimisation en tête

C’est justement à ces problématiques que souhaite répondre le Cluster Logistique Urbaine Île-de-France. Fondée en 2013, cette union de chargeurs et logisticiens avait alors pour vocation de mettre en test des solutions de livraison de marchandises en milieu urbain. Elle s’est rapidement tournée vers le fluvial, avec pour projet le développement d’un nouveau contenant spécifi quement adapté pour ce type de transport, comme l’explique Marc Bazenet, président du Cluster. « Pour accéder au maximum de ports urbains, souvent petits et contraints, nous devions nous baser sur un format adapté aux péniches de petit gabarit : le freycinet ». Le résultat : une caisse mobile de 20 m3, pouvant contenir jusqu’à 9 palettes au sol et 3,5 tonnes de charge utile, déclinée en version sèche ou température dirigée. « Aucun contenant n’avait été conçu pour optimiser ce type de volume. Des containers standard font perdre jusqu’à 30 % du volume de cale. Avec notre solution, nous pouvons mettre dans un bateau de 38 mètres jusqu’à 20 caisses, soit 180 palettes », assure Marc Bazenet.

 

Conçue avec la participation de deux carrossiers automobiles (dont Giraudon) et labélisée par le pôle de compétitivité Nov@Log, ce contenant permet également de réduire par quatre les temps et coûts de grutage : « Un bateau entier décharge ses 180 palettes en 40 minutes ». Après quoi, ces caisses peuvent être montées sur une grande variété de véhicules : par trois en semiremorque pour le pré-acheminement mais également à l’unité ou en duo pour les livraisons du dernier kilomètre. Une innovation aux multiples avantages. Elle permet tout d’abord de mutualiser une grande partie des ports BTP pour accueillir du transport de marchandises. « Si les grues de ces sites sont insuffisantes pour lever des containers maritimes, elles peuvent déplacer facilement ces caisses mobiles de 4,5 T. Nous pouvons transformer n’importe quel port en hub de logistique urbaine », explique Marc Bazenet. Et surtout, elle permet aux chargeurs d’envisager le fret multimodal au même coût que le routier, promesse du cluster, grâce à de nombreux avantages : des flux optimisés – « Nous pouvons faire cohabiter des marchandises qui n’ont pas l’habitude d’être transportées ensemble » – ainsi que des services rendus par la caisse mobile en amont et en aval du fret : « Comme cette caisse est petite, elle peut rentrer dans les usines pour préparer des commandes en temps masqué. De la même manière, sur le lieu de livraison, la caisse peut devenir une unité de stockage avancé ou de collecte. Nous avons identifié une quarantaine d’innovations de process de ce type sur l’ensemble de la chaîne logistique. » Sans oublier une diminution de 30 % des émissions de CO2.

 

À l’épreuve du quotidien

Autant d’arguments que le cluster souhaite désormais démontrer par un pilote commercial. Après plusieurs expérimentations (dont certaines aux côtés de Ooshop – Carrefour), il vient de lancer une phase de test de plus de six mois. Les marchandises auront deux points de départ – les grands ports de Gennevilliers (92) à l’Ouest et de Bonneuil-sur- Marne (94) à l’Est – avec pour destination des ports urbains parisiens tels que La Bourdonnais et Gros Caillou (VIIe), ou encore Bercy (XIIe), soit des trajets de trois heures maximum. Avec ce test, le cluster souhaite s’adresser à plusieurs secteurs. Tout d’abord dans le domaine de la collecte de déchets propres et D3E. « C’est le premier marché visé car il nous permet d’assurer le fret retour, élément essentiel pour l’équilibre de notre modèle économique ». L’éco-organisme Valdelia est ainsi le premier chargeur à acter sa participation au pilote pour de la collecte urbaine de mobiliers professionnels usagés. Le cluster vise également les marchés de l’e-commerce, du réassortiment de magasins et de la livraison du second oeuvre pour le BTP. « Nous cherchons quatre chargeurs pour cette expérimentation et sommes déjà en contact avec plusieurs entreprises intéressées ». Objectif : mettre en place une navette quotidienne et faire la preuve de la régularité du service. Avec, à terme, l’objectif d’une arrivée sur le marché : plusieurs membres du cluster ont ainsi lancé la start-up Green Switch Meridian qui aura pour ambition d’être le premier opérateur de livraison et collecte urbaine route-fleuveroute à coût équivalent avec le routier, grâce à ces caisses mobiles.

Focus

Sur les rives, de nouveaux espaces

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En 2016, l’appel à projet « Réinventer la Seine », lancé par les villes de Paris, Rouen et Le Havre, mettait à disposition plus d’une trentaine de sites situés le long du fleuve destinés à des projets innovants, dont plus d’une vingtaine dans l’agglomération francilienne. Dans cette initiative, la logistique a su trouver sa place, tout particulièrement dans deux projets portés par Sogaris. Le premier, nommé « En Seine ! » est un bâtiment logistique de 7 000 m² connecté à un port urbain pour proposer de la livraison urbaine ainsi que de la reverse logistic de déchets. Situé près du pont de Grenelle (Paris XIVe), ce site proposera également un pôle de formation et une station multi-énergies propres destinée aux particuliers et aux professionnels, afin de permettre le développement des véhicules propres dans la capitale. Exploité par Air Liquide, Ecolotrans et Total Marketing France, ce bâtiment d’un montant de 48 millions d’euros devrait voir le jour en 2020. De l’autre côté de Paris, du côté du port de Tolbiac (XIIIe), c’est un autre schéma multimodal sur lequel planche Sogaris afin de proposer de la livraison. L’entreprise annonce être d’ores et déjà en contact pour ce site avec un chargeur relevant de la filière CHR et boissons. Pendant ce temps, du côté du port de Gennevilliers (92), de la logistique fluviale va également être prochainement expérimentée au sein de la récente plateforme de messagerie de 13 000 m² que Vailog a livré à TNT l’été dernier. Objectif : proposer de l’approvisionnement par péniche jusqu’à Paris intramuros.

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