L’agroalimentaire dans le grand bain de la transformation digitale

Les dirigeants de l’industrie agroalimentaire sont unanimes : la transformation numérique est devenue un enjeu essentiel pour la stratégie de l’entreprise. 91 % d’entre eux le pensent, selon les résultats d’une enquête de l’éditeur Vif, réalisée avec le magazine L’Usine Nouvelle et publiée dans un livre blanc. Pour Antoine et Gaël Vignon, directeurs généraux de l’éditeur de logiciels spécialisé dans l’industrie agroalimentaire (IAA), la transformation numérique préfigure même l’avènement d’une véritable révolution : « Après avoir changé notre quotidien, la transformation numérique va révolutionner le monde industriel. Elle lui permettra de répondre aux enjeux d’amélioration de la performance, de sécurité alimentaire et de flexibilité, de qualité, de réduction du gaspillage et de mondialisation des marchés. »

Parmi les enseignements à retirer de cette étude, il y a mieux encore : pour 61 % des sondés, ce nouveau phénomène va leur permettre d’améliorer significativement leur performance industrielle grâce à une « usine connectée 4.0 ». Encore à l’état de concept il y a quelques années, cette expression, qui, pour résumer, correspond à l’intégration de technologies numériques dans les processus industriels, fait aujourd’hui fureur dans l’industrie. Et l’IAA n’en est pas exempte.

Un certain retard

Mais où en sont réellement les industriels du secteur ? Qu’ont-ils fait jusqu’à présent ? Si l’on se réfère aux résultats de l’étude, pas grand chose. Selon Vif, la transformation numérique des IAA s’est longtemps résumée à une panoplie d’outils de base : présence sur les réseaux sociaux, sites e-commerce, modernisation des applications… Au final, une entreprise sur cinq estime déjà que sa compétitivité n’a pas augmenté durant ces deux dernières années. Pire, si l’on ne considère que les PME de moins de 250 personnes dans le calcul, cette proportion grimpe à plus d’une entreprise sur quatre. « Aujourd’hui, le constat que nous faisons le plus fréquemment est que les industriels ne sont équipés qu’en partie, note Bruno Denis, responsable des activités infrastructures et informatique industrielle chez Vif. L’administration des ventes par des logiciels et les échanges électroniques avec la grande distribution (EDI) pour que les marchés soient normalisés sont acquis. En revanche, il y a encore tout à faire concernant la planification et la performance industrielle. »

Un mal nécessaire

Tout n’est pas perdu pour autant. Loin de là, même. Parce que les dirigeants de l’IAA considèrent la transformation numérique comme un mal nécessaire. D’abord, s'ils n’agissent pas, près de 60 % des dirigeants estiment que leurs systèmes d’information et leurs équipements seront obsolètes d’ici deux ans. Enfin, les menaces planent sur le secteur (près d’un dirigeant sur deux se sent menacé par la fluctuation du prix des matières premières et par le prix d’achat des produits par la distribution). À tel point qu’un dirigeant récalcitrant à l’idée de franchir le cap numérique peut risquer gros.

Face aux menaces, Bruno Denis conseille notamment de rationaliser ses coûts en optimisant la performance de ses lignes de production. Et l’un des moyens est de substituer l’humain à des logiciels intégrant la gestion de production, la qualité, la traçabilité, le marquage, la gestion des coûts, ainsi que le suivi de la performance : « Nous estimons que les entreprises qui n’ont pas ces logiciels auront du mal à rester sur le marché demain, car il faudra être de plus en plus réactif, savoir de mieux en mieux croiser les informations ».