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et logistique

Interview

Kuehne+Nagel : « Il faut mettre nos métiers au service d’un monde bas-carbone »

Nommée responsable RSE France chez Kuehne+Nagel en 2021, Marion Martorell revient sur les objectifs environnementaux fixés par l’acteur mondial de la supply chain pour réduire l’impact de ses activités. Un travail qui passe par le dialogue avec l’ensemble de l’écosystème afin d’avancer vers des résultats communs.

Publié le 8 avril 2022 - 13h10
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Voxlog

Quels sont les objectifs fixés par Kuehne+Nagel en termes de RSE ?

En juillet 2021, nous avons établi notre plan climat, qui a été validé par Science Based Targets, grand organisme externe qui donne des objectifs clairs aux entreprises dans le cadre de leurs efforts pour la réduction de leur empreinte carbone. Pour Kuehne+Nagel, il s’agit d’une baisse de 33 % de nos émissions de CO2 d’ici à 2030 par rapport à 2019, et sur les scopes 1, 2 et 3. Et c’est particulièrement sur ce dernier scope, qui englobe toutes les émissions indirectes dans la supply chain, que nous travaillons, puisqu’il représente 97 % de notre impact ! Tout l’enjeu de la décarbonation passe donc par une remise en question de notre modèle d’affaire, afin de savoir si celui-ci doit être transformé ou non.

 

Où comptez-vous agir pour atteindre ces objectifs ambitieux ?

Les enjeux sont très différents selon les modes de transport, car Kuehne+Nagel propose du transport aérien, routier, maritime ainsi que de la logistique contractuelle. Chaque métier a des enjeux de décarbonation bien précis. Du côté de l’aérien par exemple, nous faisons face à des limites technologiques et une absence de solution sur le marché. Dans le monde du maritime, les investissements demandés sont très conséquents, mais peuvent être portés par des grands acteurs – certains se sont d’ailleurs déjà engagés comme notre partenaire CMA CGM. Enfin, pour le routier, nous avons un écosystème très dense de petits acteurs qu’il faut embarquer sur ces sujets, et avec des solutions plus matures sur le marché. On voit bien qu’il nous faut donc trouver des solutions qui collent avec ces différents besoins. La question des territoires est aussi importante, particulièrement sur les questions énergétiques, avec parfois des arbitrages différents selon les pays. Même chose selon les secteurs : un e-commerçant n’a pas les mêmes enjeux qu'un acteur dans l’agroalimentaire ou l’industrie. Il nous faut suivre également l’évolution des carburants, qu'ils soient de transition (gaz, bio-fioul) ou réellement bas-carbone. Dans tous les cas, il n’existe pas de solutions qui nous permettront de continuer nos activités sans les modifier profondément dans le futur, d’autant que les nouvelles technologies ne pourront pas être une réponse unique. Il faut en conséquence que nous mettions nos métiers au service d’un monde et d’une consommation bas-carbone, ainsi que de la transition de nos clients.

 

Cela nécessite-t-il pour un acteur comme Kuehne+Nagel de devoir se projeter sur le long terme ?
Oui. Toutes nos réflexions doivent être complétées par la question de l’adaptation aux risques environnementaux. Le réchauffement climatique va entrainer des modifications météorologiques et certaines infrastructures avec lesquelles nous travaillons (ports, aéroports, routes) pourront être soumises à des difficultés, et il nous faut avoir une vision là-dessus. Nous menons donc des analyses de risques, avec plusieurs scénarios, ce qui est là encore un élément crucial pour nos différentes verticales. Ainsi, vu l’évolution de la consommation, les politiques publiques sont en train de décourager l’utilisation des véhicules en ville, particulièrement ceux roulant aux énergies fossiles. Il faut anticiper ces changements pour nos activités de transport et avec nos clients dans l’automotive.

 

Comment faites-vous avancer cette transition aujourd’hui au sein du groupe ?

C’est avant tout une affaire de gouvernance, et c’est pour cela que nous avons un comité RSE qui rassemble tout le comité de direction pour faire monter le sujet au plus haut niveau du groupe et prendre des décisions collégiales qui restent cohérentes avec les ambitions de business. Il faut réaliser tout un travail de sensibilisation et de compréhension autour du sujet, qui reste très complexe et parfois antinomique avec certains états d’esprits tournés vers la production et la croissance. Après quoi, on peut se mettre en marche pour changer les choses.

 

Et comment se passent les échanges avec votre écosystème ?
En tant qu’affréteur, nous avons peu de moyens propres, même si nous travaillons, sur nos flottes de camion, à tester des motorisations plus durables. Du côté de l’aérien et du maritime, nous investissons beaucoup dans des acteurs des biocarburants, par exemple, qui sont souvent jeunes et pas encore à l’échelle. Ces filières ont besoin de notre soutien pour se développer, mais nous avons aussi besoin que nos clients croient en ces solutions. Il faut donc créer du dialogue entre les compagnies maritimes pour leurs navires, les ports pour leurs infrastructures, mais aussi les clients, que l’on sent de plus en plus engagés sur le sujet. Pour les plus avancés d’entre eux, on voit bien qu’après s’être concentrés sur leur production et leur packaging, ils ont la maturité pour se tourner maintenant vers leur supply chain et leur transport, ce qui est très positif.

 

Quels sont vos projets pour 2022 ?
Tout d’abord la structuration de notre département RSE, qui est encore jeune. Nous allons mener aussi, d’ici la fin de l’année, une analyse des risques. Il s’agit de procéder en deux étapes : tout d’abord, observer les risques physiques liés au climat sur nos actifs, puis monter des plans d’action par métier, pour chaque business unit. Nous avons aussi des grands projets de développements digitaux pour pouvoir utiliser la data de manière opérationnelle dans la prise de décisions, en interne et pour nos clients qui n’ont pas toujours de visibilité sur ces sujets.

 

 

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