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Transport

"Aujourd’hui, le fret ferroviaire et le combiné sont traités comme des variables d’ajustement"

Dans son dernier communiqué, l'Alliance 4F tire la sonnette d'alarme : n'ayant pas reçu de réponse du gouvernement suite à sa demande d'aide pour faire face à la hausse des prix de l'énergie, l'organisation réunissant les acteurs du fret ferroviaire alerte sur la menace pesant sur le transport combiné rail-route et l'ensemble de la chaîne logistique en France. Précisions avec Ivan Stempezynski, porte-parole de l’Alliance 4F et président du GNTC (groupement national des transports combinés).

Publié le 9 janvier 2023 - 10h23
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Alliance 4F I Ivan Stempezynski, porte-parole de l’Alliance 4F et président du GNTC 

De quelle manière avez-vous vu évoluer la prise en considération par le gouvernement du fret ferroviaire depuis la crise sanitaire ?
En 2020, la reconnaissance dont le secteur avait fait l’objet par le ministre délégué en charge des Transports, Jean-Baptiste Djebbari, et par le Premier ministre, Jean Castex, ainsi que les aides qui nous ont été amenées n’ont pas été lettres mortes. Cela s’est traduit par une croissance réelle puisque le transport combiné a progressé, entre 2020 et 2021, de 16,6 %. Cette croissance, nous la devons au marché, logisticiens et industriels, qui nous ont confié leurs flux à transporter. Pourquoi cet engouement ? Car nous cochons les cases de la décarbonation, mais également parce que la capacité de transport routier a décliné. Ces 16,6 % d’augmentation indiquent que le marché a besoin du combiné rail-route. aA regard de cette situation, le dernier entretien de l’alliance 4F avec notre ministre de tutelle, Clément Beaune, le 16 novembre dernier, ne nous a pas donné l’impression d’être véritablement écoutés.


L’alliance 4F indique dans son dernier communiqué déplorer « le silence du gouvernement concernant l’attribution d’aides pour surmonter la crise énergétique ». Vous attendiez une réponse sous quinzaine qui n’est pas venue ?
Deux dossiers ont été évoqués avec Clément Beaune lors de cet échange. Le premier concerne la qualité du réseau qui n’est pas au rendez-vous ainsi que sa capacité à accompagner notre croissance, notamment sur l’attribution de sillons qui se fait tous les ans avant le changement de service. Les réponses de SNCF Réseau à l’ensemble de la filière que nous représentons a été de l’ordre de 73 %, c’est-à-dire qu’on assure au demandeur qu’il pourra circuler à 73 % sur l’année qui vient, le reste se faisant en fonction de l’offre et de la demande. Mais on ne peut pas dire aux entreprises que pendant 27 % de l’année, elles ne vont pas pouvoir fonctionner ! Aujourd’hui, le fret ferroviaire et le combiné en particulier sont traités comme des variables d’ajustement entre les flux voyageurs et les travaux qui sont effectués sur les lignes. Cela n’est plus supportable au vu de notre croissance, des volumes que nous transportons et de la qualité que demandent les chargeurs. Le deuxième sujet touche à la gestion de l’énergie : nous fonctionnons en électrique sur le rail et les prix ont tellement augmenté que cela met désormais en péril notre filière.


Dans ce cadre, vous avez demandé lors de cet entretien un plafonnement du prix de l’électricité de traction ferroviaire à hauteur de 180 € par mégawatt heure et la prise en charge des frais de péages facturés par SNCF Réseau ?
En effet, c’est ce plafonnement, accompagné de la gratuité des péages, qui était prégnant dans notre demande, et nous n’avons pas « sorti du chapeau » ce montant de 180 euros, il s’agit d’une disposition qui a été évoquée au niveau européen. Ne pas avoir de réponse depuis ce rendez-vous mi-novembre, c’est mettre en danger non seulement la filière, mais également la capacité de transport au niveau national et porter préjudice aux industriels et aux logisticiens qui ont besoin du combiné et du ferroviaire pour acheminer leur production. À côté de cela, la Stratégie nationale pour le développement du fret ferroviaire reprenait, en septembre 2021, l’objectif d’un doublement de la part modale du fret ferroviaire d’ici 2030 de 9 à 18 %, inscrit dans la loi Climat et Résilience d’août 2021. Or, la loi prévaut sur les décisions et les atermoiements, et aujourd’hui, ces décisions ne sont pas suivies d’actions. Nous avons interpellé Clément Beaune sur ce sujet : nous ne pouvons pas investir et répondre à la demande tout en n’ayant aucune visibilité…

 

Cette hausse des coûts de transport pourrait-elle aboutir au renoncement du ferroviaire au profit de la route par certaines entreprises ?
Au-delà des convictions, les entreprises répondent à la règle économique. Donc, à partir du moment où il n’est plus possible de produire, avec un coût de revient qui a explosé, cela conduit à remettre des camions sur les routes, à l’inverse de ce qui était évoqué dans la loi Climat. Mais nous avons toujours l’espoir d’avoir des réponses même si le délai est dépassé. Nous savons que la DGITM [Direction générale des infrastructures, des transports et des mobilités] est tout à fait imprégnée du dossier et y travaille activement, mais nous regrettons que le ministre de tutelle n’ait pas tenu ses engagements. Au début de cette année 2023, nous devons remettre les offres tarifaires à nos clients et nous ne sommes pas en mesure de le faire sauf à leur indiquer qu’il y a un risque d’augmentation de 15 à 20 %, ce que personne ne peut supporter aujourd’hui. D’autre part, en renonçant au mode de transport combiné, nous savons que nous ne serons pas aptes à de se reporter entièrement sur le routier en termes de volume et de quantité, donc l’heure est grave. La question se pose : est-ce que pour se faire entendre, il faut prendre une partie de l’économie en otage en bloquant les gares avec nos locomotives ? Ce serait dramatique d’en arriver là alors que nous avons entamé un dialogue avec le ministère. Certaines professions comme les boulangers ont bénéficié de dispositions particulières pour faire face à la hausse des prix de l’énergie, nous souhaitons également bénéficier de ces dérogations.

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