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et logistique

Transversal

Vers une nouvelle institutionnalisation de la logistique

Publié le 6 mai 2021

2. Des logisticiens « montrés du doigt » ?

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Si le maillon du transport aura été davantage mis en lumière pendant la crise, Cécile Michaux, déléguée générale du Pôle d’intelligence logistique de la région Rhône-Alpes, se montre en revanche plus mitigée sur la « valorisation » de la logistique, pas certaine que, côté consommateurs, la prise de conscience ait opéré : « Celle-ci demeure peu comprise car peu visible, le marketing passant son temps à promettre au client que la logistique sera invisible, fluide, immédiate et gratuite », observe-t-elle. Chez France Supply Chain, le président, Yann de Feraudy, constate que L’État cherche bien à soutenir l’économie et à suivre la volonté du rapport Daher-Hémar afin de rendre la France plus compétitive en termes de logistique avec « une volonté qui ne se dément pas assortie d’une vision de la nécessité de redynamiser l’économie », mais tempère : « Il y a néanmoins des tensions au sein de la majorité et à l’extérieur, et les transporteurs/logisticiens sont parfois montrés du doigt, ce qui n’est pas toujours très juste ».

 

D’autres soulignent également des lignes qui tardent à bouger et à intégrer une vision générale des problématiques du secteur, à l’instar d’Éric Hémar. Le président de l’organisation professionnelle Union TLF (Union des Entreprises Transport et Logistique de France) et président d’ID Logistics observe un « vrai support des pouvoirs publics pendant la crise » ainsi qu’une forte réactivité « pour être capable de prendre des décisions rapides » mais des fondamentaux qui n’ont pas beaucoup été touchés : « Quand on entend parler d’un Plan de relance ferroviaire sans réflexion sur la massification amont et la création de plateformes logistiques en aval, quand on annonce une charte portuaire sans s’interroger sur les causes profondes des problématiques des ports, et quand on voit des dynamiques anti-entrepôt, on se dit qu’il y a encore énormément de travail… », déplore-t-il. C’est finalement le doute et la posture de Saint-Thomas attendant de voir pour croire, qui pourraient venir traduire certaines positions d’acteurs sur le sujet, parfois échaudés par de précédentes initiatives, à l’instar de Cécile Michaux : « Typiquement, la stratégie France Logistique 2025, avait suscité beaucoup d’effets dans la profession car il s’agissait d’une approche assez globale et décloisonnée. Nous étions tous demandeurs et impliqués. Sont arrivées les élections présidentielles de 2017, un changement de majorité, et cette stratégie a fini au fond d’un tiroir… Derrière, on commande le rapport Daher-Hémar et on crée France Logistique. On est très contents mais il n’est pas nécessaire de repartir de zéro à chaque fois ! ». Pour embrasser pleinement les enjeux de la filière, la déléguée générale du Pôle d’intelligence logistique estime qu’il faut pouvoir la traiter de manière transverse avec ses usages variés, à l’instar du numérique, au lieu de la considérer comme un secteur d’activité unique : « C’est manifeste sur la stratégie vaccinale qui a montré le peu de compréhension de ce qu’est une supply chain quand il s’agit d’anticiper l’approvisionnement et mener une démarche de distribution puissante, rapide et urgente à l’échelle d’un pays… ».

 

Une « mise en cohérence » attendue

À ce sujet, la tenue du Cilog dans son aspect « interministériel » joue en la faveur de ce décloisonnement recherché, à condition qu’il s’inscrive bien dans la continuité et survive aux prochaines élections présidentielles. « On va dans le bon sens », juge ainsi Alain Borri, co-fondateur et CEO de bp2r et membre du conseil d'administration de France Supply Chain : « Les mesures prises permettent d’apporter des aides et du soutien direct, mais sont plutôt à prendre dans le cadre de la transition écologique sur le long terme. La question est maintenant de savoir comment faire pour que ces annonces aient un impact à court terme car le temps qui nous reste est désormais compté ». La ministre déléguée chargée de l’Industrie, Agnès Pannier-Runacher avait souligné l’importance accordée à ces mesures par le gouvernement lors de sa visite sur le site de FM Logistic à Mormant (77) en décembre dernier : « Nous avons annoncé 16 mesures pour améliorer la compétitivité et déployer des solutions nouvelles pour la logistique. Il faut que les entreprises françaises, face à la compétition européenne dans le secteur, puissent jouer sur le même terrain avec des règles clarifiées. D’autant que la logistique est un des secteurs qui va créer le plus d’emplois dans notre pays dans les années à venir ».

 

Pour l’Union TLF, un des membres fondateurs de France Logistique, le Cilog a en tout cas pour mérite de ne pas être « dans l’effet d’annonce mais dans le vrai travail opérationnel ». Les 16 mesures en découlant vont « dans la bonne direction », selon Éric Hémar. Ce dernier établit en revanche un constat mitigé sur la prise en compte opérationnelle des enjeux logistiques par les institutions, observant notamment des schémas de logistique urbaine « non cohérents et non adaptés ». Le président de L’Union TLF espère néanmoins les voir « basculer du bon côté » dans le cadre d'une stratégie nationale structurée de la logistique urbaine durable attendue à l’été 2021 grâce à des recommandations concrètes émises par un groupe de travail comprenant la présidente de France Logistique, Anne-Marie Idrac.

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