Éditeurs
Hébergement logiciel : la supply chain poursuit sa mise à jour
5. De cruciaux enjeux de souveraineté

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Nancy Pauwels via stock.adobe.comÀ l’heure où les cyberattaques et les ingérences de pays étrangers ne cessent d’inquiéter les acteurs d’une supply chain mondialisée, une kyrielle d’éditeurs de logiciels proposent des offres davantage garantes de la sécurité des données. D’autres pionniers présentent des hébergements entièrement souverains.
« Les quatre principaux acteurs du cloud public, Google, Microsoft, Amazon et Oracle, sont américains, expose Florent Boizard, directeur de l’unité commerciale (BU) supply chain software d’Hardis Group, à la fois entreprise de services informatiques, intégrateur du CRM Salesforce et éditeur de la suite logicielle Reflex, principalement adoptée pour ses applications en entrepôts. Or, certaines entreprises cherchent à ne pas dépendre du droit américain, ce qui est extrêmement complexe dans le monde du logiciel. Car bien que la data présente dans un WMS ne soit pas forcément des plus sensibles, peuvent pour autant s’y retrouver (pour des activités e-commerce notamment) le nom des clients rattachés à leurs produits et les données nécessaires à l’impression de l’étiquette de livraison de colis. Nombre de sociétés étatiques ou issues de l’industrie aéronautique, de la défense, souhaitent également disposer d’un cloud français et/ou européen, pour des raisons évidentes. »
« Rester vigilant »
Originaire de Grenoble, Hardis Group reste prudent face aux velléités de développement des hyperscalers, anglicisme désignant par métonymie des multinationales ayant immensément contribué à l’adoption du cloud, grâce à leur accès à des ressources démesurées. Et ce même si ces mastodontes pourraient hypothétiquement devenir plus transparents en nouant des partenariats avec des acteurs européens, dont hexagonaux. « Nous sommes attentifs au projet de cloud souverain français des Américains, poursuit Florent Boizard. Je pense particulièrement à S3NS, la joint-venture entre Thales et Google. Ces deux acteurs conçoivent actuellement un cloud qui permettra de bénéficier des technologies de Google dans un contexte souverain. Il faut tout de même rester vigilant, puisque le gouvernement américain a tendance à invoquer le principe d’extraterritorialité dès qu’il y a des dollars en jeu. »
Lutter contre les ingérences étrangères
Un point de vue entièrement partagé par le groupe Prologistik, dont les équipes françaises issues de l’acquisition de la société nantaise DSIA (pionnière dans l’hébergement de ses solutions supply chain sur ses propres centres de données tricolores) ont contribué à renforcer sa notoriété sur le Vieux Continent. « Il est important aujourd’hui que les données soient présentes sur le territoire français ou du moins européen, pour éviter tous les risques d’ingérence de puissances étrangères, signifie Pierre-Yves Lebreton, directeur technique riche d’une trentaine d’années d’expérience dans l’informatique et les réseaux pour DSIA (avec un passage de près de dix ans sous la houlette de Kuehne+Nagel), exerçant désormais pour la filiale Prologistik France. Avec le RGPD et les problématiques liées aux données personnelles, nous sommes bien plus sereins lorsque nous stockons toutes nos datas sur le territoire français et européen, plutôt qu’à l’extérieur. Car en parallèle, le Cloud Act permet aux services américains d’accéder à n’importe quelles données, même si elles ne sont pas hébergées aux États-Unis. Ils peuvent ainsi très bien atteindre celles stockées en Europe chez Amazon, Microsoft ou Google. Sans être obligés de prévenir qui que ce soit. »
Focus
Vers une augmentation des coûts ?
« Les coûts des infrastructures cloud augmentent-ils ? La réponse est oui, et en permanence, énonce Patrick Bourg, associé-fondateur de Belharra. Du fait de l’augmentation des prix de l’énergie et de la conjoncture internationale notamment. Cette hausse est aussi liée aux usages de l’IA générative grand public, quasiment gratuite ; les acteurs qui la proposent doivent bien la financer. Nous maintenons de notre côté notre volonté d’être le plus économe en ressources techniques, avec des développements applicatifs peu consommateurs. Nous nous appuyons sur une IA de type machine learning, algorithmique, pas si consommatrice que cela, lorsque l’IA générative l’est éminemment. Il faut bien faire la distinction entre les deux. Nous avons par ailleurs initié une démarche numérique responsable et pragmatique, avec un soin apporté sur l’éco-conception. À quoi bon développer une application tel un feu d’artifice, avec une faible valeur ajoutée métier, mais un prix d’infrastructure et des consommations bien plus élevés ? Faire preuve de sobriété permet de diminuer le coût d’une plateforme cloud. »
