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Pics d'activité en logistique : quelles solutions pour des flux décuplés ?

Publié le 19 décembre 2019
SOMMAIRE

Black Friday, Noël, nouvelles collections, opérations marketing : l’intensité des activités logistiques va et vient au fil des saisons, testant toujours plus les capacités d’adaptation des gestionnaires d’entrepôts. Si le concept de pics d'activité n’a rien de nouveau dans le secteur, les exigences de ceux-ci ont cependant connu des évolutions fortes ces dernières années. Quelles réponses technologiques, organisationnelles et humaines sont mises en place aujourd’hui par les acteurs de la logistique pour absorber ces périodes tendues de plus en plus nombreuses ? Éléments de réponse aux côtés de prestataires et d’e-commerçants, en amont d’une nouvelle fin d’année aux volumes décuplés.

Les pics d’activité ? Voilà une problématique loin d’être neuve du côté des entrepôts logistiques. Pourtant, depuis quelques années, difficile pour les prestataires de ne pas constater une accélération générale : si le domaine du retail était par exemple habitué à voir ses volumes doubler, ceux-ci peuvent se retrouver sextuplés dans le cadre d’activités e-commerce « La démocratisation des achats en ligne et l’augmentation générale des commandes nous obligent à une autre approche et une autre manière de planifier », estime Bernard Wehbe, directeur général supply chain France et Suisse de XPO Logistics. Même constat du côté de Rhenus Logistics, où Sophie Conte, sa directrice du développement détaille : « Les flux peuvent augmenter de 50 % sur un seul mois. Plus compliquée encore est la variabilité de ces périodes : dans un même trimestre, on peut subir des semaines aux tendances totalement contraires, avec des pics et des creux ». Et certains évènements très marqués par le passé sont aujourd’hui supplantés par d’autres : « Il y a quelques années, les soldes rythmaient nos activités dans le secteur du retail, avec des sites qui montaient à 230 000 pièces par jour. Aujourd’hui, c’est un non-évènement, avec des volumes deux fois moins importants, car les nombreuses ventes privées organisées dans l’année ont lissé les flux. Désormais, c’est le e-commerce qui donne le ton », précise Bertrand Chabrier, directeur du développement chez C-Log.

 

Une problématique croissante selon Thomas Mortier, CEO de Staci, spécialiste de la logistique BtoB: « L’anticipation devient de plus en plus compliquée pour les clients, obligés de réagir rapidement face au succès d’un produit, d’une campagne ou une évolution de la consommation des ménages ». Pour les acteurs du e-commerce qui doivent de surcroit répondre aux exigences du consommateur final, la prise en compte de ces variations est essentielle. « Notre défi chez Cdiscount est d’offrir le même service à notre client qu’il commande un 15 décembre ou à la mi-avril », résume Loïc Bocquet, directeur du site logistique Cdiscount de Cestas (33). Pour Sophie Conte, c’est le retail tout entier qui connaît de nouvelles tensions : « Paradoxalement, ceux qui peuvent avoir les pics les plus forts sont parfois ceux qui se battent contre le e-commerce. Nous sentons la pression du côté des acteurs ayant des points de vente. Ils doivent approvisionner en un temps record leur réseau pour faire face à la concurrence de la vente en ligne afin d’éviter qu’un client volatile achète leurs produits sur une plateforme qui n’est pas la leur. On le constate particulièrement dans la distribution spécialisée ».

 

Des effectifs démultipliés

Pour traiter plus de volume, de références ou de commandes sur des périodes bien précises, il n’y a pas de mystère : il faut s’appuyer sur plus de personnel. Cette année chez Cdiscount, l’e-commerçant va ainsi passer de 750 opérateurs sur ses tâches logistiques à un effectif total de 3 500 personnes au niveau national. Même son de cloche du côté d’XPO Logistics à l’approche de Noël au niveau européen : « Sur la période de fin d’année, nous allons recruter de 12 000 à 15 000 employés supplémentaires sur le continent. L'activité e-commerce d'un acteur du textile sur un de nos sites va nécessiter de passer de 200 à 1 200 personnes au moment du Black Friday. Au-delà même de la question des recrutements, il faut aussi être capable d’accueillir tout ce personnel, avec des vestiaires, des parkings et la mise en place de formations », raconte Bernard Wehbe. Premier défi donc : celui du recrutement. Pour les acteurs du e-commerce ayant de forts pics en fin d’année, il s’agit donc de s’y prendre très tôt, avec des premières actions dès le mois de février pour la fin d’année, dans un contexte de pénurie de main d’oeuvre qualifiée : « Nous donnons nos prévisionnels aux agences d’intérim très en amont afin qu’elles puissent sourcer pour nous des profils adaptés. Nous lissons ensuite ces prévisions au fil de l’année pour être au plus juste », détaille Loïc Bocquet. C’est également le cas sur le site logistique de Kuehne+Nagel situé à Châtres (77), entrepôt spécialisé dans le e-commerce où le prestataire traite les flux d’un des plus grands acteurs mondiaux de la vente en ligne. « Nous préparons les pics de fin d’année dès le mois de mars sur la base des résultats de l’année précédente », précise Luc Souberbielle, directeur du site logistique.

 

Mise en formation

Et une fois les bons opérateurs trouvés, c’est alors une complexe phase de formation qui est mise en place dès la fin de l’été. « Nous commençons à intégrer le nouveau personnel dès le mois de septembre pour la partie réception, au moment où nous remplissons nos entrepôts, puis nous grossissons nos rangs en préparation de commandes et en expéditions jusqu’au Black Friday. Si les exigences varient selon les métiers, les nouveaux venus sont autonomes en trois ou quatre jours, puis performants en deux semaines maximum. C’est un peu plus long en réception, car les connaissances requises pour le contrôle des produits avant la mise en stock sont plus importantes », détaille Loïc Bocquet pour Cdiscount. La question des durées de formation est un sujet essentiel pour Rhenus Logistics, qui a souhaité les accélérer, afin d’avoir des montées en puissance plus rapides. « Nous travaillons sur de nouveaux outils digitaux : des serious games pour mieux comprendre les process, ou encore des casques de réalité virtuelle pour les tester. Cela permet un apprentissage plus rapide, plus convivial, et qui s’adresse à un public jeune, très à l’aise avec le digital. C’est aussi un moyen de vérifier plus finement l’apprentissage des équipes, avec des évaluations et des indicateurs très précis », juge Sophie Conte. Mais il ne suffit pas seulement d’avoir de nouveaux venus en entrepôt, encore faut-il les accompagner au quotidien dans leurs tâches. Et cela ne peut être possible qu’avec des ressources complémentaires de managers, que les logisticiens viennent chercher directement chez les salariés en CDI. « Pendant ces pics, il nous faut des personnes incollables sur nos process sachant diriger des équipes. Autant dire qu’il est impossible de les trouver via des recrutements externes. Nous choisissons donc des opérateurs qui ont envie d’évoluer et de monter en compétence. Sélectionnés dès le mois de juin, ils sont formés au management en septembre. Il s’agit d’une collaboration gagnant-gagnant : pour nous, ce sont des formations plus rapides avec des équipes mobilisées. Pour eux, c’est une expérience de terrain et un tremplin qui peut être valorisé ensuite. Deux tiers de nos chefs d’équipe ont débuté de cette manière », nous raconte Loïc Bocquet.

 

Repenser l'activité

Mais l’intégration de nouvelles équipes n’est pas la seule stratégie utilisée par les logisticiens pour répondre aux variations de leurs activités. Pour certains, il s’agit également de mettre en place de meilleures conditions de flexibilité. Chez Staci, cela réside dans la mutualisation des activités au sein d’entrepôts multisecteurs. « Cela nous permet d’éviter d’avoir sur un même site des acteurs ayant des saisonnalités similaires. Au contraire, en travaillant sur plusieurs segments, nous compensons les pics des uns avec les périodes plus calmes des autres. Cet équilibrage est permis par la mutualisation de notre système d’information mais aussi grâce à la polyvalence de nos équipes », explique Thomas Mortier. Pour cela, Staci s’appuie sur des clusters de plusieurs entrepôts, permettant de délocaliser temporairement ses activités d’un site voisin à l’autre. Pour permettre cette flexibilité organisationnelle, l’entreprise s’est équipée d’une solution de business intelligence, Qlik Sense, qui « centralise l’ensemble des flux et donne une vision à la fois globale et de chaque site. Une tour de contrôle qui nous permet de mettre en place l’ordonnancement, grâce aux prévisions et à notre connaissance des clients. Nous avons aussi des remontées des taux d’occupation pour réallouer nos surfaces d’une mission à l’autre en fonction des besoins », détaille Thomas Mortier. Les outils de planification et de gestion des ressources sont également une aide décisive chez XPO Logistics. « Nous nous appuyons sur un logiciel interne, nommé Smart, qui nous permet de nous organiser autour des volumes communiqués par nos clients en amont et d’estimer les moyens dont nous aurons besoin », explique Bernard Wehbe. « Il ne faut pas négliger la puissance du WMS, assure de son coté Sophie Conte. Avoir un outil évolutif et paramétrable, capable de prendre en compte des données complexes en quantité importante peut faire la différence ».

 

Autre levier : celui de l’automatisation. Chez XPO Logistics, la robotique collaborative a ainsi été déployée pour augmenter la productivité en entrepôt. « Notre capacité à investir aujourd’hui dans de nouvelles technologies nous permet de garder une longueur d’avance », estime Bernard Wehbe. C’est le cas sur l’entrepôt du groupe Mars à Boigny-sur-Bionne (45) où un bras robotisé de préparation permet de traiter de 500 à 700 palettes par jour, soit jusqu’à soit 60 000 colis quotidiens. Le logisticien a également déployé une trentaine de robots du constructeur français Exotec, pour assurer la préparation de commandes pour le compte de Showroomprive. Ces robots viennent apporter les articles aux opérateurs automatiquement. « Nous pouvons changer le nombre de machines en opération, ce qui nous offre beaucoup de flexibilité selon la volumétrie », signale Bernard Wehbe. Du côté de C-Log, on cherche aussi à développer des solutions industrielles d’automatisation pour la gestion de ces augmentations d’activité. « Nous avons déployé de la mécanisation qui nous permet de multiplier nos volumes par dix d’une journée à l’autre. Mais il faut aller plus loin dans l’automatisation. D’autant que, si des solutions existent pour le mass market, elles sont difficilement réplicables dans le haut de gamme, qui nécessite des prestations particulières et manuelles, même en période de pics », précise Bertrand Chabrier. Ces périodes d’activité intense sont aussi l’occasion pour les prestataires de déployer de nouvelles prestations pour offrir plus de service à leurs clients, comme le fait Kuehne+Nagel sur le site de Châtres : « Nous optimisons l’expédition des commandes en mettant en place des sous-tris en sortie de ligne afin d’amener les commandes au plus près des zones géographiques concernées sur toute la France et l’Europe. Cela évite que les expéditions ne repassent par un hub pour ré-éclatement. Ainsi, bien que le transport ne soit pas géré par Kuehne+Nagel, nous permettons tout de même d’offrir des livraisons plus rapides. C’est potentiellement une demi-journée de traitement qui est ainsi gagnée », raconte Luc Souberbielle.

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