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Immobilier

Immobilier logistique : un marché dynamique soumis à l'accélération des flux

Publié le 17 janvier 2018

Le marché de l'immobilier est en train d’évoluer sous la pression du e-commerce et du regroupement sur de vastes sites pour optimiser les flux. La construction de plateformes logistiques XXL n’est plus hors-norme aujourd’hui. Parallèlement, avec un nombre de colis qui devrait doubler d’ici 2022 et des politiques publiques de transport plus restrictives, les modèles de logistique urbaine sont en train de s’élaborer. Quelle place aura l’immobilier logistique dans cette équation ? Sept patrons de groupes spécialisés dans le domaine répondent.

1. Les entrepôts XXL deviennent la norme

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Sous l’effet du redéploiement de la supply chain de la grande distribution et de l’explosion du e-commerce, la majorité des nouveaux immeubles logistiques dépassent désormais 50 000 m². Ils s’implantent sur tous les territoires régionaux pour répondre à la demande de livraison express des consommateurs.

En 2017, le marché de l’immobilier logistique se porte bien en France grâce au soutien de plusieurs transactions XXL. Sur les 48 transactions de plus de 10 000 m² du 1er semestre 2017, huit affichent une surface totale supérieure à 40 000 m² et représentent à elles seules plus de 40 % de la demande placée du marché national. Autre point important, la part des clés-en-main est révélatrice de l’évolution du marché. Celles-ci représentent les six plus grosses transactions de ce trimestre dont Amazon avec 107 000 m² à Boves (80), Alinéa à Nanteuil (79) avec 73 000 m² et Lidl avec 58 000 m² à Montchanin (71). « Quand nous raisonnons en surface cumulée, les entrepôts XXL représentent au moins un quart du marché », indique Christophe Bouthors, président du directoire du groupe Panhard. « Une situation inédite depuis près de onze ans que nous concevons et réalisons des programmes pour les investisseurs, pure players et chargeurs, renchérit Jean-Michel Frammery, directeur général de Quartus Logistique. 80 % de nos programmes en cours dépassent les 50 000 m². »

 

La course aux grandes dimensions est loin d’être achevée. « Nous sommes passés à des tailles d’entrepôt jamais atteintes jusqu’alors en France, avec 250 000 m² pour le futur site d’Amazon à Brétigny ou 100 000 m² à Amiens », explique Didier Terrier, directeur général d’Arthur Loyd Logistique. Première raison à l’inflation des mètres perceptible depuis plusieurs années : la rationalisation des processus logistiques de la grande distribution et des enseignes spécialisées ainsi que la mutualisation des équipements pour diminuer leurs coûts. « La nouvelle taille standard de 50 000 m² permet de massifier le stock pour des canaux de distribution variés », souligne Jean- Paul Rival, directeur général de Concerto, la filiale de Kaufman & Broad spécialisée dans le développement de plateformeslogistiques. À chaque fois, le regroupement concerne deux ou trois entrepôts qui se fondent en un seul site. Il s’agit d’une vraie tendance où les propriétaires et chargeurs optimisent leurs coûts, en immobilier, en main-d’oeuvre et en transport. « Un entrepôt est une enveloppe autour d’un processus, ajoute Jean-Paul Rival. Fondamentalement, le rôle de l’utilisateur demeure de recevoir, stocker et distribuer les produits, le plus rapidement possible désormais. »

 

Gérer efficacement l'omnicanalité à partir d'un même entrepôt

L’essor grandissant du e-commerce (+14,3 % depuis 2016) met aussi la pression sur les augmentations de surface. « Les pure players de la vente en ligne, Amazon en tête, disposent d’un portail Internet et d’une logistique performante derrière, renchérit Christophe Bouthors. Ils se sont affranchis de la logique de localisation des magasins et cherchent leur barycentre par rapport à des clients finaux qu’ils vont directement livrer. » Nouveauté par rapport aux années précédentes, les ecommerçants sont désormais en train de réaliser un maillage territorial plus fin même s’ils ne représentent qu’un cinquième des nouvelles opérations. Autre tendance récente, les commerçants traditionnels ont besoin de gérer dans les mêmes entrepôts logistiques les stocks des magasins et du e-commerce ; une partie du bâtiment doit donc être dédiée au picking et à la mise en place des lots et le travail d’éclatement des palettes jusqu’aux colis uniques se fait sur les plateformes logistiques. Désormais, il faut stocker trois fois plus de produits pour répondre à une demande en flux tendu. Cultura, qui emménagera à Moissy-Cramayel (77) au premier semestre 2018, a choisi une surface de 56 000 m², soit le double de sa superficie actuelle. Le distributeur culturel et de loisirs créatifs a expliqué que son outil informatique était conçu pour pouvoir tripler les volumes à l’avenir.

 

Un des grands enjeux futurs sera de parvenir à gérer le plus efficacement possible l’omnicanalité à partir d’un même entrepôt et d’augmenter la qualité du flux logistique et la mise en oeuvre de la lean logistique, cette supply chain du juste à temps. « L’arrivée du big data dans les processus logistiques va bouleverser les systèmes de livraison dans les années à venir et entraîner la fabrication d’entrepôts adaptables aux différents flux du client », indique Andrew Stacey, directeur général de P3 en France. Autre question, d’ordre politique celle-ci, posée par la taille de ces immeubles logistiques : « Quand on crée des bâtiments de plus de 800 m de long et de plus de 100 000 m² se pose la question de l’acceptabilité de la part des collectivités locales. Les études en amont, l’attention portée aux questions architecturales et l’insertion dans le site sont d’autant plus essentielles », précise Christophe Bouthors.

 

Recomposition des territoires

Les choix stratégiques opérés récemment par la grande dis-tribution font bouger les barycentres et recomposent les territoires. « Le fait que des distributeurs comme Carrefour, Intermarché ou la Socamil (Leclerc) réalisent des entrepôts XXL ayant pour vocation d’alimenter plusieurs formats de magasins, crée des nouveaux pôles logistiques sur des zones qui étaient jusqu’ici en devenir », indique Jean-Michel Frammery, directeur général de Quartus Logistique. À 50 kilomètres de Toulouse, Castelnaudary accueillera dans deux ans un immeuble logistique de 90 000 m² de la Socamil sur le frais, le sec, le bazar et le surgelé sur un stockage grande hauteur de 22 mètres. « Les nouveaux entrepôts régionaux de la grande distribution qui animent actuellement le marché restent situés à proximité de leurs points de vente ; ainsi l’attrait de la dorsale pour les investisseurs immobiliers se heurte aux besoins de la grande distribution, précise Didier Terrier. Un bâtiment de 100 000 m² va se construire à Montauban (82), Carrefour a implanté un 100 000 m² à Sens (89) et prochainement 130 000 m² à Artenay (45) ». Les responsables des groupes logistiques indiquent aussi un appétit pour la Bretagne ou les Pays de la Loire.

 

Concerto a développé sur Honfleur (14) un projet en gris de 117 000 m². « Nous avons jeté notre dévolu sur Le Havre (76) dont la zone est amenée à se développer dans une logique d’hinterland, qui permet de faire du transbordement par l’estuaire, indique Jean-Paul Rival. Il est symptomatique de notre approche où nous cherchons des territoires où le potentiel est intact. » Christophe Bouthors indique que le groupe Panhard est très présent en Île-de-France et dispose de programmes en développement du côté du port du Havre, dans le bassin lyonnais et en région Paca. « Pour nos clients, notre valeur ajoutée est de savoir développer des projets malgré leur complexité. » Ces réalisations, souvent situées dans les marchés secondaires ou en dehors de la dorsale, laissent une autre question en suspens pour les six à quinze prochaines années. « Si demain ces bâtiments devaient se vider sur des régions où les bassins économiques sont moins forts, la question de la difficulté à les commercialiser viendrait à se poser », indique Didier Terrier.

 

Les mezzanines s'imposent

Faut-il alors spécialiser le bâtiment pour qu’il demeure attractif quel que soit le futur client ? Entre 70 000 et 90 000 m², les entrepôts restent traditionnels avec une hauteur de 10 à 12 mètres sous plafond. « Le seul élément de standardisation dans l’immobilier logistique est celui qui conduit à construire plus grand », juge, pour sa part, Jean-Michel Frammery. « La typologie des immeubles tend à varier, nous sommes loin de la standardisation des années 2000 sur 24 000 m² avec une hauteur de 9,90 mètres », souligne un autre responsable. Certes, la grande distribution utilise des immeubles traversant de 120 mètres de profondeur avec de nombreux passages à quai et les entrepôts du e-commerce comportent une partie réception avec stockage et une partie expédition pour la messagerie avec une halle moyenne de 40 000 m². Mais ces entrepôts XXL sont conçus de manière à être très divisibles pour des demandes pouvant diverger. Évolution notable, les mezzanines se sont imposées dans le paysage de ces entrepôts surdimensionnés. À 15 m de haut, les logisticiens travaillent sur deux, voire trois niveaux. « Une mezzanine de trois mètres de haut dans la zone de préparation donne un vrai plus », souligne Jean-Paul Rival. Une nécessité d’autant plus grande que l’on se rapproche des métropoles.

 

Avec Paris Air2 Logistique, Vailog (filiale du groupe Segro) développe un des derniers sites XXL à proximité de Paris. Au coeur du port fluvial de Gennevilliers, il servira de base de distribution de la ville de Paris par véhicules électriques et navettes fluviales. Outre le bâtiment de messagerie, actif depuis septembre dernier sur 13 000 m², il comprendra la construction d’un entrepôt sur deux niveaux de 63 000 m². Il offre des hauteurs sous poutre de 10 mètres au rez-de-chaussée et de 7 mètres au premier étage. « Les cours pour les camions des deux niveaux auront une pleine profondeur de 35 mètres tout le long des quais », souligne Marco Simonetti qui explique avoir optimisé la charge foncière du bâtiment, dont la livraison est prévue fin 2018, en construisant un étage supplémentaire. Peut-être la prochaine tendance à suivre.

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