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Le port : un écosystème en transition écologique et numérique

Publié le 17 décembre 2020
SOMMAIRE

Efficacité environnementale et digitalisation ne peuvent plus être séparées, l’une devant contribuer à améliorer la performance de l’autre. Les défis à relever pour construire le port de demain intègrent cette combinaison durable et digitale au sein d’un écosystème élargi.

750 milliards d’euros sur la table pour l’Union européenne. Le plan de relance économique présenté le 3 septembre 2020 pour surmonter les impacts de la crise sanitaire, comporte également des exigences, énoncées par la Commission européenne : 37 % de ces dépenses doivent être allouées aux objectifs environnementaux européens, dont la neutralité carbone à horizon 2050 et 20 % à la digitalisation de l’économie. Développement durable et numérisation : un diptyque qui intègre aujourd’hui tout mouvement de transition, sphère logistique y compris. Le système portuaire n’échappe pas à ce duo gagnant qui infuse ses nouveaux projets.

 

Accélération de la digitalisation

Pour poursuivre leur activité, les acteurs portuaires auront ainsi pu compter et s’appuyer, comme dans la sphère logistique en général, sur des systèmes d’information performants, capables de les guider à distance grâce aux entreprises IT rompues à cet usage. « Nous avons monté en l’espace de quelques jours “Soget à domicile” : dès le début du confinement nous avons mis gratuitement à disposition de nos clients plus de 300 tunnels crypto-sécurisés. Ainsi les entreprises portuaires logistiques, commissionnaires et armateurs, ont pu continuer à opérer en télétravail en toute sécurité », illustre Hervé Cornède, président du directoire et directeur général de la Soget, la société havraise spécialiste du PCS (Port Community System). La pandémie aura révélé deux enjeux : la nécessité de posséder des outils digitaux pour gagner en performance et améliorer les process ainsi que celui d’être doté de systèmes extrêmement sécurisés. Bolloré Logistics confirme cette tendance, la crise sanitaire ayant incité le prestataire logistique et transport, déjà rompu à la dématérialisation des documents, à « accélérer sur certains dossiers permettant d’aller vers plus de fluidité et de renforcer les mesures sanitaires vis-à-vis des collaborateurs, stipule Paul Bernard, directeur Région Normandie de Bolloré Logistics. C’est le cas notamment de la prise de rendez-vous des transporteurs qui, jusqu’alors, se présentaient à l’accueil et étaient ensuite réorientés vers les portes de quai pour charger et décharger. Nous sommes actuellement en train de travailler sur un outil leur permettant de réserver un créneau à l’avance, de recevoir un QR code qu’ils flashent à l’entrée du site leur donnant l’instruction du quai vers lequel se rendre ».

 

Même observation chez l’expert français en Cargo Community Systems, MGI : « Nous sommes déjà très interconnectés avec ceux des armateurs et des transitaires, Delta de la douane… Le confinement a montré la pertinence de cette mise en place, qui a permis de ne pas créer de rupture dans notre qualité de service, puisque les flux étaient déjà digitalisés », corrobore Dominique Lebreton, membre du directoire et directeur audit, projet et commercialisation de MGI. Si le monde portuaire semble avoir déjà atteint une certaine maturité sur le sujet, la période du confinement au printemps aura vu les utilisateurs appuyer sur la pédale d’accélérateur : « Certains de nos clients nous ont indiqué souhaiter aller plus loin, avec l’aide de MGI, dans la dématérialisation de leurs documents administratifs transférés dans la chaîne logistique. Les technologies sont matures pour opérer cette transformation, ce qu’il faut, aujourd’hui, c’est travailler avec nos administrations de tutelle pour accepter la digitalisation complète », juge-t-il. La période aura également vu de nouveaux acteurs s’intéresser à une interconnexion avec le système d'information de MGI : assurances, banques, exportateurs et importateurs. « Des acteurs peu connectés dans notre système et ayant des besoins de traçabilité de la marchandise avec un tiers de confiance neutre », cite Dominique Lebreton.

 

Une approche globale

Il s’agit ainsi de participer à un mouvement de fluidification et de fiabilisation des informations, car malgré le mouvement croissant vers la digitalisation, les informations erronées dues au facteur humain sont toujours présentes : « Il y a encore des marges de progrès importantes à réaliser sur ce sujet, confirme Gilbert Bredel, président de Contargo North France. Et cela génèrera également des gains en termes environnementaux avec un impact indirect sur la réduction des déplacements à vide et des mouvements inutiles ». Pour construire le port de demain, les champs à travailler sont encore vastes et les segments concernés intègrent logistique, transport, prise en compte foncière, mais aussi nouvelles technologies et énergies durables. « On observe à ce sujet des approches territoriales à la fois à l’intérieur du port et dans son territoire élargi », constate Jean-Pierre Chalus, président de l’UPF. Cette concentration sur la place portuaire d’un ensemble d’acteurs différenciés, concourant à l’efficience opérationnelle et à la compétitivité de la zone, se traduit chez le prestataire logistique du port du Havre, XP Log : « Notre but est de montrer la synergie entre la politique portuaire et la stratégie logistique des clients. Nous sommes véritablement le trait d’union entre les chargeurs et les ports », estime Olivier Jean-Baptiste, directeur de XP Log, qui espère transformer l’essai dans quelques années à Marseille en offrant à ses clients, en plus d’une entrée nord sur l’hinterland du Havre (alimentant l’ouest de la France et la région parisienne), une entrée logistique sud via Marseille.

 

Le prestataire Bolloré Logistics qui a investi sur le parc logistique Paris Normandie, et plus récemment à Marseille dans des bâtiments HQE, est également l’illustration de cette approche globale mêlant prospectives immobilières et souci environnemental, permettant la performance des flux de transport et une logistique durable. Il est ainsi indispensable aujourd’hui, juge CMA CGM, de faciliter l’implantation des entrepôts logistiques dans les ports et à proximité afin d’y accompagner et soutenir la hausse du trafic de conteneurs : « Le port du Havre compte 2,7 millions de m² d’entrepôts dont 500 000 m2 en cours de développement et a engagé près de 40 millions d’euros pour renforcer les activités logistiques », détaille le groupe.

 

Un écosystème en symbiose

Car force est de constater que le port ne peut plus simplement être considéré comme un lieu de manutention de marchandises, mais plutôt comme un vaste ensemble composé des entreprises qui y sont implantées et des sociétés alentour, offrant la possibilité de recycler le produit de l’un pour générer un bénéfice chez son voisin, « par exemple, réutiliser la chaleur produite ici pour faire le chauffage du bâtiment d’à côté. Le port n’est plus qu’un port, c’est vraiment le coeur d’un écosystème qui fonctionne en symbiose, juge Fabien Becquelin, directeur opérationnel de la fédération Norlink. Il faut penser global, s’appuyer les uns sur les autres. On voit d’ailleurs, au sein de notre fédération, certains projets portés par un mode de transport glisser ensuite naturellement sur un autre, simplement parce que l’on découvre de nouvelles choses et que l’on parvient à faire avancer les projets ».

 

L’union fait la force : l’adage a sans doute conduit CFNR Transport à intégrer en tant que gestionnaire commun, avec la CCI de Meurthe-et- Moselle et ArcelorMittal, un consortium public-privé incluant les 11 ports fluviaux de la Moselle, dans l’objectif de relancer la voie d’eau : « La décision finale n’est pas encore arrêtée mais le groupement a été retenu par le Syndicat mixte ouvert, pour des négociations exclusives. Nous avons monté ce consortium avec la CCI de Meurthe-et-Moselle compte tenu de son expérience dans la gestion d’infrastructures et son savoir-faire en gestion des programmes de subvention tandis que, chez Rhenus, nous nous positionnons comme opérateur portuaire et qu’Arcelor Mittal dispose de réserves foncières importantes sur le Nord lorrain. Cet ensemble a donc une cohérence immédiate au niveau opérationnel mais surtout, à moyen terme, en matière de valorisation du foncier. L’objectif est également de développer le trafic multimodal sur le port de Metz et sur le Sud lorrain à Frouard et Champigneulles », détaille Jean-Marc Thomas, directeur général de CFNR Transport. Cette concession aura ainsi la particularité d’unifier le Sud lorrain avec le Nord lorrain et visera à y intégrer des occupants en conformité avec les attentes de la nouvelle concession. « Pourquoi le Nord lorrain ? Parce que nos voisins luxembourgeois, commencent à éprouver des problèmes de coûts du foncier qui nous amènent à penser que, d’ici 5 à 10 ans, de plus en plus d’entreprises cibleront la zone de Thionville pour s’implanter avec un coût de foncier supportable en logistique. Et nous allons être vigilants sur la qualité et les promesses que feront les futurs occupants en termes de RSE », spécifie-t-il.

 

Être en mesure de proposer des services multiples autour du système portuaire, c’est l’ambition de Haropa dont l’offre s’articule autour de quatre piliers : l’offre maritime, l’offre foncière permettant d’accueillir des industries ou des logisticiens, l’offre multimodale et l’offre de facilitation du passage de la marchandise. « Nous nous employons quotidiennement à optimiser chacun de ces quatre piliers. Sur les accès nautiques, le port de Rouen a finalisé le programme Accès qui permet de gagner un mètre de tirant d’eau sur les 120 km du chenal. Sur le foncier, nous continuons nos efforts pour implanter de nouveaux clients industriels ou logistiques ; et en matière de multimodalité nous poursuivons l’aménagement de plateformes multimodales le long de la Seine, la prochaine en date étant le PSMO pour “port Seine métropole Ouest” à la confluence de l’Oise et de la Seine », explique Olivier Ferrand. Au final, il s’agit d’offrir une cohérence d’ensemble autour de ces grands axes, en favorisant les synergies industrielles entre les acteurs installés. Un des enjeux de la fusion des trois ports Haropa, dont Stéphane Raison vient récemment de prendre les fonctions de directeur général préfigurateur du Grand port maritime d’État Haropa.

 

Des enjeux à relever

Les défis logistiques à relever pour le port de demain sont alors multiples : « Il s’agit en premier lieu de continuer à s’adapter à l’évolution du trafic maritime et aux nouvelles générations de navires. Avec l’augmentation de leur taille, l’accessibilité maritime et le tirant d’eau du port sont fondamentaux. Les équipements portuaires doivent aussi pouvoir répondre aux besoins des géants des mers », estime le groupe CMA CGM. La transformation numérique du port est un autre axe en ce qu’elle permettra d’améliorer la gestion du trafic, de le dynamiser et de gagner en fluidité. Les innovations permettront également des réductions de coûts sensibles pour tous les acteurs portuaires : « Le port de Rotterdam prévoit d’équiper les quais de capteurs sur les murs, bouées et pontons, ce qui permettra de collecter des informations sur l’accostage, les conditions météo et les flux et ainsi donner la possibilité aux compagnies maritimes de prévoir les heures optimales de départ et d’arrivée, de réduire leur temps d’accostage et la consommation de carburant de façon significative », poursuit CMA CGM. Et pour l’armateur, en matière environnementale, c’est l’utilisation de l’hydrogène qui demeure « un défi majeur. Les infrastructures et équipements portuaires devront s’adapter pour recevoir les navires propulsés à l’hydrogène, comme pour le GNL avec notamment des engins de manutention dédiés ou encore la construction de quais », termine-t-il.

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