Immobilier
5. Des bâtiments secs généralement peu chauffés
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Groupe Franc Architectures | Au Coudray-Montceaux (91), le Groupe Franc Architectures a été sollicité par Telamon pour concevoir une messagerie de 12 000 m², exploitée par GLS. Entièrement modulable, elle a été pensée pour être reconfigurée si besoin, en cas de changement futur d'activité.Du fait de leur configuration et des activités qu’ils accueillent, les entrepôts secs ne sont, excepté dans les espaces de bureaux mitoyens, généralement pas ou peu chauffés. Un autre vecteur participe à diminuer de facto leurs besoins en chauffage : le changement climatique.
Important poste de dépenses des ménages et de nombreuses entreprises tertiaires, le chauffage (surtout au gaz) peut peser lourd dans le porte-monnaie. Mais contrairement aux habitations particulières et aux bureaux, les bâtiments logistiques dits « secs », en particulier les messageries, y recourent souvent peu du fait de leur typologie et de leurs activités. Un autre facteur, systémique et plus malheureux, contribue à diminuer le recours aux installations de production de chaleur. « Avec le réchauffement climatique, on ne chauffe plus beaucoup les entrepôts, et ce même dans le Nord de la France », note Laurent Dubos, country manager France du gestionnaire européen de biens immobiliers logistiques Logicor. « Les systèmes de chauffage ne sont peu ou plus utilisés, sauf pour des raisons sociales liées à une politique interne particulière. Ils ne servent généralement plus qu’à faire du hors-gel pour les sprinklers. Sachant que pour que ces systèmes de protection anti-incendie puissent geler, il faut qu’il y ait des températures négatives pendant plusieurs jours d’affilée. »
Répondre « à une potentielle mutation des activités » du bâtiment
Cependant, cette diminution générale des besoins de chauffage en entrepôts ne doit pas éclipser la nécessité d’améliorer, quand requis, leur enveloppe thermique. D’autant plus pour limiter les gaspillages de matières premières liées aux déconstructions hâtives, comme l’explique Jérémy Chauvidon, architecte associé et directeur de l’agence de Paris (environ 50 collaborateurs) de l’Agence Franc, société membre du Groupe Franc Architectures : « Lorsque nous sommes sollicités sur un site vacant, nous ne savons pas forcément, d’un point de vue architectural, quel va en être l’usage final. Il est important de faire preuve de pédagogie afin de souligner l’intérêt à bien améliorer la qualité thermique d’un bâtiment, même non chauffé. Le confort en hiver y sera toujours plus appréciable ; nous répondrons également, en anticipation, à une potentielle mutation de ses activités. Car si un jour il devait être chauffé, il serait dommageable de devoir refaire intégralement son isolation en jetant tout à la poubelle. »
Une question d’image et de qualité de vie
Couplé à un bâti de qualité et à des équipements informatiques de pilotage adéquats, un bon système de chauffage améliore au passage la liquidité des entrepôts. Plus faciles à revendre auprès des investisseurs, des bâtiments logistiques performants permettent aussi d’accroître la compétitivité de leurs exploitants, tout en améliorant le quotidien de leurs salariés. « Une passoire énergétique serait largement décotée », assure Laurence Giard, directrice générale de Segro France, foncière immobilière de dimension européenne spécialisée en immobilier logistique et industriel. « La moitié environ de nos clients du secteur logistique sont des 3PL, donc des prestataires mis très régulièrement en concurrence sur des appels d’offres. Dans l’optique de remporter des contrats auprès des donneurs d’ordres, la performance énergétique des bâtiments leur fait gagner des points cruciaux. S’y ajoute une question d’image de l’entreprise, relative au bien-être de ses salariés : des bâtiments énergétiquement efficients influent positivement sur la qualité de vie au travail, sujet sur lequel nous travaillons beaucoup pour l’ensemble de nos clients. »
De nouveaux usages
Chez Prologis, géant américain de l’immobilier logistique également très présent en France, les experts métiers s’appliquent à transposer, dans l’Hexagone, de nouveaux usages bien plus ancrés dans d’autres pays. Pour son projet Connect Paris, un centre de logistique urbain de 67 000 m², sur cinq niveaux, qui sera érigé dans le 17e arrondissement de la capitale, l’investisseur et développeur prévoit par exemple de raccorder ce futur bâtiment à étages au réseau de chaleur urbain. « Cette pratique est particulièrement répandue chez Prologis, notamment dans les pays nordiques où quasiment tous les bâtiments sont raccordés au chauffage urbain », indique son directeur de la construction Paul Janssen.
Des systèmes réversibles
Le responsable de Prologis précise de plus que les équipements thermodynamiques modernes ne servent pas qu’à augmenter la température. Ils peuvent aussi, en effet, comprendre des systèmes dits « réversibles », capables à la fois de réchauffer ou de refroidir un bâtiment : « Il est important de noter l’existence de plusieurs solutions de pompes à chaleur, certaines étant plus “plug and play”, faciles à mettre en œuvre que d’autres. Par exemple, les pompes à chaleur air-eau comprennent de gros blocs positionnés en extérieur. Nous en intégrons par ailleurs sur nos derniers développements. De l’autre côté, les pompes à chaleur air-air comprennent des unités de climatisation appelées “rooftop”, du fait de leur installation en toiture des bâtiments logistiques et industriels. Les besoins en chaleur et en rafraîchissement variant selon les locataires, nous n’allons pas installer la même solution sur chaque bâtiment. »
Focus
Quid de la géothermie ?
Interrogé sur la très faible présence de systèmes géothermiques au sein des entrepôts tricolores, Antonin Chrétien, directeur de projets chez Systenza (EOL), partage son expérience et sa vision technique : « La géothermie reste pour l’instant marginale, car elle nécessite des investissements conséquents et des besoins de chaud importants et constants pour la rentabiliser. La géothermie sur nappes se retrouve tout de même particulièrement dans la vallée du Rhône, région propice à ce système. Concernant la géothermie sur sondes, plus complexe, de notables subventions à venir en 2026 la rendront beaucoup plus intéressante économiquement, avec un ROI inférieur à 10 ans. En revanche, elle demande dans tous les cas un réel investissement de la part du client : outre de l’espace disponible et de lourds travaux, elle nécessite aussi des études longues et approfondies. »

© Groupe La Poste | Piloté par La Poste Immobilier, développé en partenariat avec Barjane et construit avec le concours d'APRC Group, un bâtiment logistique de près de 19 000 m² (qui devrait ouvrir ses portes à Gondreville au printemps 2027) exploitera la géothermie pour son chauffage et son rafraîchissement.