Immobilier
8. Un parc tricolore de plus en plus efficient
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Ludovic Delage - Objectif AéroSi certains pouvaient être légitimement troublés par les prémices floues du décret tertiaire, la quinzaine d’acteurs interrogée dans le cadre de ce dossier se disent sereins quant à la conformité des entrepôts français. Habitués aux diverses réglementations, nombre d’entre eux vont même au-delà des obligations légales.
À la question « Êtes-vous confiant dans la bonne mise en conformité de votre parc immobilier logistique par rapport à la première échéance du décret tertiaire ? », Panattoni répond « Oui », et ce avec plus de quatre ans d’avance. « Nous avons par exemple fait auditer l’un de nos bâtiments, situé à Meaux, par un cabinet spécialisé sur les questions énergétiques. Leurs conclusions attestent que nous avons atteint, voire sommes au-dessus des objectifs à 2030 du décret tertiaire », illustre Romaric Pottier, asset and property manager de Panattoni France.
« Des enjeux économiques et pratiques immédiats »
Même son de cloche chez Segro, qui souligne l’intérêt à respecter voire outrepasser les réglementations énergétiques et environnementales, dans l’optique d’améliorer la valeur de son parc immobilier, tout en satisfaisant ses nombreux clients. « Le décret tertiaire et les autres réglementations entraînent clairement des enjeux économiques et pratiques immédiats, liés tout simplement à la réduction des coûts d’exploitation pour nos clients. Bien qu’ils y soient attentifs, ces derniers sont conscients que des gaspillages énergétiques subsistent, et que les usages peuvent encore être améliorés. De notre côté, la sobriété et l’efficience influent directement sur la valorisation de nos actifs immobiliers », décrit Laurence Giard, la directrice générale en France de la foncière d’origine britannique.
Un label bas carbone dédié à l’immobilier logistique
Si le décret tertiaire, le décret Bacs ou encore la loi Aper s’appliquent à améliorer la performance énergétique des bâtiments et à favoriser la production d’énergie renouvelable, le sujet de l’empreinte carbone globale des entrepôts n’est pas encore correctement étudié ni harmonisé. C’est en ce sens que les associations BBCA et Afilog, aux côtés d’une pléiade d’entreprises majeures de l’immobilier logistique, portent l’initiative LBCI (pour Low Carbon Building Initiative). Leur objectif : créer le premier label bas carbone européen, dédié aux actifs logistiques, reposant sur une méthodologie harmonisée de comptabilité carbone des bâtiments sur leur cycle de vie. Partie prenante du projet, Logicor est justement « en train de développer des opérations bas carbone », comme le rapporte Laurent Dubos, son responsable en France. « C’est un sujet sur lequel nous poussons tous les curseurs au maximum, en accord avec notre vision durable de la gestion d’actifs. »
Cette labellisation, dont la finalisation est prévue pour 2026, viendra aussi combler les insuffisances, en matière d’analyse carbone poussée et complète, des certifications environnementales volontaristes. À noter cependant que dans sa dernière version – la V7, qui remplacera les versions 2016 et V6 à compter du 27 janvier 2026 –, le référentiel Breeam, on ne peut plus populaire en France, comprend des normes plus rigoureuses pour le suivi et la réduction de l’empreinte carbone.
De notables progrès, mais des efforts à poursuivre
À grand renfort de décrets et de mises à jour, les services étatiques compensent eux aussi, progressivement, les lacunes des précédentes réglementations. Si l’ensemble des acteurs interrogés dans ce dossier témoignent, de façon univoque, des notables progrès de l’immobilier logistique français dans l’efficacité énergétique des bâtiments et la réduction de leur empreinte carbone, de nombreux efforts resteront, encore et toujours, à fournir. « Le décret tertiaire est à la fois intelligent et un peu inquiétant, car il vient combler l’énorme manque qu’ont les réglementations sur la performance énergétique : la RT 2000, 2005, 2012 et la RE 2020. Or si la RE 2020 est censée être 80 % meilleure que la RT 2000 sur le papier, les consommations des bâtiments tertiaires n’ont baissé que d’une petite quinzaine de pourcents en une décennie », conclut Marc Esposito, directeur innovation (numérique et environnementale) de GSE.
Focus
Embarquer les salariés
Pour que les économies d’énergie soient vraiment au rendez-vous, l’équipement et la mise aux normes des entrepôts ne font pas tout. Comme l’étaye Gabriel Franc, directeur général du Groupe Franc Architectures, chargeurs et prestataires doivent aussi embarquer leurs salariés dans une démarche vertueuse : « Des outils ludiques (écrans, tableaux de bord, applications mobiles…) peuvent permettre aux salariés de prendre conscience des consommations d’énergie de leur bâtiment et de ses espaces administratifs. Cette pédagogie de la sobriété énergétique est d’autant plus importante dans les vastes entrepôts de plusieurs dizaines de milliers de mètres carrés, pouvant parfois aussi comprendre des milliers de mètres carrés de bureaux. »